10-2014


Le collectif de soutien aux habitants Roms

de Bobigny a souhaité répondre

aux propos du préfet sur France Info

suite à l'expulsion du terrain des Coquetiers


L'expulsion du bidonville des Coquetiers à Bobigny en Seine Saint Denis a abouti à un désastre.

Des 80 enfants scolarisés du terrain, seuls 8 vont encore à l'école aujourd'hui.

Familles séparées, dispersées aux quatre coins de France, bébés et vieillards malades jetés à la rue, formations professionnelles interrompues brutalement, voilà le bilan de cette expulsion qui se voulait "exemplaire".


A la journaliste de France Info qui l'interrogeait ce mardi sur ce bilan, Didier Leschi, préfet délégué à l'égalité des chances (!) en Seine Saint-Denis, répondait en insistant sur les moyens inédits déployés pour cette opération.

Certes, de l'argent, on en a dépensé : 320 000 euros d'argent public, brandis comme une médaille.

Ce n'est pas faute d'avoir lésiné sur les moyens, disait le préfet désemparé.

Mais vous comprenez, avec les Roms, on a affaire à "une sociologie qui nous échappe"


Tout est là.

Imputer l'échec de l'opération à la "sociologie" des Roms, c'est dire, une fois de plus, que les Roms sont différents, et que c'est cette différence consubstantielle qui met, qui mettra toujours en échec nos tentatives pourtant généreuses, pourtant bienveillantes, pour les "aider".

Avec les Roms, disait Didier Leschi, "on ne sait pas faire".


C'est dommage, parce que les Roms des Coquetiers, eux, dans leurs baraques en bois, ils ne se débrouillaient pas si mal.


Mugurel, par exemple.

Ses deux enfants étaient scolarisés et il était depuis deux ans élu délégué des parents au conseil d'école.

Mugurel travaillait pour de vrai, avec un vrai contrat, à Aulnay.

Mugurel venait d'ailleurs de recevoir une proposition de logement social à Bobigny.

Mugurel, on l'a expulsé du terrain où il vivait.

Sa situation, ses efforts d'intégration ? Aucun intérêt.

On a proposé à Mugurel une chambre d'hôtel à Hardricourt, à 60 km…

Il se lève tous les matins à 4h pour partir à 6h accompagner ses enfants à l'école avant de prendre le chemin de son travail.

Bien sûr, s'il perd son travail, il pourra dire adieu à son logement social.

Combien de temps va-t-il encore tenir?


On aurait aussi pu aller rencontrer Habibe, la maman de Dragan.

Habibe, c'est une femme énergique, qui a appris le français aux cours du soir de l'école.

Elle servait même d'interprète aux intervenants, sur le terrain.

Son fils Draganest rentré en septembre en CAP.

Aujourd'hui, Habibe, son mari et son fils se retrouvent à Belfort.

Exit le CAP qui aurait permis à Dragan d'avoir un métier, de devenir un contribuable comme les autres.


Et Abel, Adelin et Lola, les trois cousinsqui venaient chaque jour au collège, qui avaient appris à parler français, à lire, à écrire?

Pourtant, ça n'a pas toujours été facile avec les autres élèves.

Venir à l'école, quand on est un enfant rom, c'est aussi se heurter au rejet de certains enfants, et même de certains adultes.

Mais ils sont venus chaque jour.

Abel voulait être policier, Lola voulait être coiffeuse.

La maman d'Abel et Adelin venait à chaque réunion parents-profs.

Les parents avaient à cœur d'acheter la photo de classe, avec leurs petits moyens.

Aujourd'hui, ces trois enfants dorment dans des camionnettes, bien loin du collège.

On leur avait bien proposé une solution de relogement, mais on avait séparé la famille.

Lola et ses parents sont arrivés dans une chambre sans eau, sans électricité, avec 3 couvertures pour 7 personnes.

Et il n'y avait pas de classe d'accueil au collège, là-bas.

Lola ne pouvait pas poursuivre sa scolarité.


Finalement, ils ne se débrouillaient pas si mal, ces gens.

Ils ne demandaient pas grand-chose.

Une inscription à l'école pour leurs enfants, comme tout le monde.

Le ramassage de leurs ordures ménagères, comme tout le monde.

Du travail, comme bien d'autres avant eux.

Du travail, l'école, un minimum d'hygiène, le droit de tenter sa chance comme tout un chacun… c'est cela, une sociologie qui nous échappe?


Non, à vrai dire, rien ne nous échappait.


Si l'objectif avait été d'accompagner ces familles, de trouver des solutions pour de vrai, on n'aurait pas procédé de cette façon.

On n'aurait pas sommé des familles, le lundi après-midi, de prendre le premier train du mardi pour une destination inconnue, en abandonnant l'école du petit, les études du grand, le travail du père, les grands-parents par-dessus le marché, et en jetant à la rue 60% des habitants du terrain, avec leurs bébés, sous la pluie et sous les quolibets des CRS.

La méthode employée ne pouvait mener qu'à l'échec.


Cette expulsion était simplement une obsession du préfet Galli et une promesse de campagne du candidat Stéphane de Paoli à la mairie de Bobigny.(UDI)

Elle n'avait pas "vocation à" aider les familles, seulement à s'en débarrasser.


Trop de familles roms en Île de France, dans des zones déjà sinistrées par le chômage, certes.

Des bidonvilles insalubres et dangereux pour leurs habitants, certes.

Des solutions pouvaient, devaient être proposées, c'est vrai.

Mais il aurait fallu anticiper, accompagner les familles, les préparer à un changement de vie et d'environnement, ne pas les disperser, ne pas briser leurs efforts d'intégration.

Et surtout, il aurait fallu faire avecelles, en partant de ce qu'elles avaient déjà construit.

Pas les traiter, encore et toujours, comme des objets qui seraient incapables d'agir par eux-mêmes.


Qu'est ce que cela coûtait d'attendre la fin de l'année scolaire, de laisser les enfants finir leur année, et surtout de laisser aux intervenants le temps d'accompagner véritablement, de trouver des places en apprentissage ailleurs en France, de laisser à tous le temps de se projeter dans un avenir nouveau ?

Pourquoi cette absurde précipitation qui a tout détruit, qui a plongé ces familles dans des complications inextricables ?


Peut-être aurait-il fallu les rencontrer, ces gens.

Prendre le temps de leur parler, au-delà du « diagnostic », réduit à la collecte de quelques données administratives.

Mais c'est sans doute inenvisageable… pensez donc, aller parler d'égal à égal avec des gens dont la "sociologie" nous échappe à ce point !


Les démarches entreprises pour faire évoluer la situation des familles roms en France n'ont pas vocation à fonctionner tant qu'elles reposeront sur cet éternel préjugé que pour les Roms, c'est différent, qu'on ne peutpas parce qu'ils ne veulentpas.

Tant qu'on refusera de considérer les Roms comme des migrants du travail, on ira à l'échec.

On continuera à orchestrer une chasse au Rom, une chasse coûteuse pour l’État et désastreuse pour les familles.

Nous qui les avons accompagnés pendant plusieurs années, nous savons qu'ils ne demandent rien de plus, rien d'autre que ce que nous demandons chaque jour à la vie.

Ils ne sont pas substantiellement différents.


Il n'y a pas de culture de la misère, pas de culture de la saleté ni de la mendicité; seulement les affres de la misère et de l'exclusion, seulement des choix qu'on fait quand on n'a pas le choix.

Ce ne sont pas les pauvres qu'il faut combattre mais bien la pauvreté.

Comment peut-on avoir encore besoin d'énoncer cette évidence en 2014?


Tant que nous considérerons les Roms comme une sous-catégorie d'hommes, tant que nous resterons convaincus que nous ne pouvons pas agir aveceux, tant que nous leur refuserons le statut de sujets, nous donnerons aux préfets et aux élus toute latitude pour tuer dans l’œuf les efforts d’intégration des Roms.


Nous leur permettrons, comme aujourd’hui, d’entretenir et d’aggraver la misère aux frais de l’État.

Et certes, il y a là quelque chose qui nous échappe.

Camp des Coquetiers - Bobigny (93) 10-2014


Le préfet reconnaît


que l’essai n’a pas été transformé


La préfecture avait pourtant promis que tout serait fait dans les règles et quelque part…. proprement.

Malgré l’argent dépensé, des familles ont été séparées, des enfants et leurs parents jetés sur le trottoir, et des chambres insalubres louées à prix d’or sont restées vides.

Didier Leschi, le préfet délégué à l’égalité des chances en Seine Saint Denis, reconnaît que l’essai n’a pas été transformé.

Mais l’évacuation du camp des Coquetiers reste selon lui ce qu’on a tenté de mieux pour les Roms dans le département.


Mais la question se pose et on lui demande au préfet Leschi… quand même est-ce que ces dysfonctionnements à la chaîne ce n’est pas un fait exprès ?

Est-ce qu’on ne cherche pas tout simplement à décourager les familles ?

Il s’en défend.


Mardi 21-10 après-midi,

le bidonville de Bobigny où vivaient depuis plusieurs années 200 à 400 personnes, selon différentes estimations de la préfecture et des associations, a été évacué par les forces de l'ordre.

Une expulsion programmée et anticipée par la préfecture, qui expliquait que deux diagnostics sociaux avaient été réalisés.

Ainsi une trentaine de familles dont les enfants étaient scolarisés ont obtenu un relogement dans des foyers Adoma.

Une dizaine d'autres, dont l'un des parents a un revenu fixe, devait recevoir une proposition de relogement en HLM dans le département.

es autres enfin devaient être hébergées à l'hôtel.


Mais voilà, hier soir, mercredi 22-10 57 Roumains et Bulgares - dont 27 enfants - s'apprêtaient à passer une deuxième nuit dans un gymnase de Paris, à deux pas de la gare du Nord.

«Je n'ai plus aucun rôle à jouer, lâche le préfet du 93.

Nous avons évacué le camp, pris en charge de nombreuses personnes, dépensé 320 000 € pour le placement de nombreux ménages en foyer, les autres ont le droit de circuler librement.

Je ne me sens pas redevable.

Et si je n'ai pas de conseil à donner à la Ville de Paris, je ne suis pas certain qu'ouvrir un gymnase soit une solution. »


Source : blog Aulnaylibre.

http://www.aulnaylibre.com/article-bras-de-fer-entre-le-prefet-du-93-et-paris-apres-l-evacuation-du-camp-rom-des-coquetiers-a-bobigny-124844628.html

Les 90 familles roms

du camp des Coquetiers

seront expulsées le 21 octobre à 6h.


20 octobre 2014 |  Par entraides-citoyennes


A Bobigny, demain, 90 familles roumaines et bulgares (environ 300 personnes) seront expulsées...

Tous les enfants de ce camp en âge d'être scolarisés le sont grâce à l'implication des associations.

Certains parents ont trouvé un petit boulot.

Les associations se sont impliquées inlassablement pour aider à l'intégration de ces personnes qui vivaient là depuis trois ans.

Tout sera à refaire demain...


Le discours officiel :

il n'y a pas d'hébergement possible en Île-de-France, l’État fait un effort énorme avec cette mobilisation d'Adoma et nous ne pouvons intégrer aucune famille de plus, il ne nous revient pas de ne pas exécuter une décision de justice, en cas d'accident nous serions personnellement responsables, aucune mairie ne veut de ces populations - s'il y en avait une qui voulait donner un terrain je serais tout prêt à expérimenter.


Seule information nouvelle, 4 destinations sont prévues.

D'après les cartes fournies aux familles, elles sont plutôt 5 :

Doullens (Somme), Louvroil (Nord), Bourges, Belfort, Besançon.

Les préfets sur place sont prévenus des besoins de scolarisation.


Nous n'avons obtenu aucune information sur la date précise de l'évacuation :

"dans les 48h, ce n'est pas encore décidé ...",

ni même de savoir si les familles seront prévenues.



Communiqué du Collectif RomEurope93


Le bidonville de la rue des Coquetiers, à Bobigny, où vivent depuis années plus de 90 familles roumaines et bulgares et où tous les enfants vont à l'école, va être évacué ces jours-ci, justement pendant les vacances.

La politique de destruction aveugle poursuivie à l'encontre des bidonvilles rejettera une fois de plus à la rue soixante familles, dans les conditions les plus horribles.


Fait exceptionnel en Île-de-France, une démarche d'accompagnement est toutefois prévue pour une trentaine de familles ayant des enfants scolarisés.

Une évacuation hâtive ne peut que compromettre cette avancée.

Les familles ont à choisir sans le moindre délai entre la rue et l’acceptation d’un appartement-foyer hors Île-de-France, entre leur réseau social et familial et un logement dont elles ignorent tout – sauf qu'il se trouve dans un ailleurs lointain et inconnu.


De surcroît, les appartements-foyers ne sont attribués que pour un an au maximum.

Romeurope 93 ne comprend pas et ne peut accepter que cette première mise en œuvre en Seine-Saint-Denis de la mission confiée à ADOMA en janvier dernier soit condamnée à l'échec par la hâte d'en finir avec un bidonville où les efforts d'intégration des habitants sont pourtant reconnus.


Romeurope 93 demande que l'on tienne compte lors du relogement des démarches d'insertion des familles, de leurs réseaux familiaux et de solidarité, de la présence de classes d’accueil indispensables pour la réussite scolaire des enfants et très rares en province.

Elle estime nécessaire que l'on attende la fin de l'année scolaire pour se donner le temps d'un réel accompagnement social et pour éviter toute interruption de la scolarité.


Romeurope 93 considère par ailleurs qu'il est totalement irresponsable de jeter à la rue à la veille de l'hiver soixante familles, des bébés, des personnes âgées très malades, et de réduire ainsi à néant des années de médiation sanitaire.


Attendre la fin de l'année scolaire permettrait là aussi de mettre en place de véritables mesures d'hébergement et de suivi pour l'ensemble des habitants des Coquetiers.

Entre-temps, il est parfaitement possible par quelques mesures simples d'améliorer leurs conditions de vie et de prévenir le risque d'incendie.