A Calais,

 

quinze ans d'impuissance de l'Etat

 

Le Monde.fr | 23.10.2014

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1994 : ouverture du tunnel sous la Manche

Le tunnel qui relie la France et le Royaume-Uni attire de premières vagues de migrants, qui cherchent à passer la frontière dans des camions de transport de marchandises.

Kurdes, Kosovars, Roumains ou Polonais... au gré des bouleversements géopolitiques, des clandestins de tous les pays affluent vers Calais.

En attendant un éventuel passage, ils errent toujours plus nombreux dans la ville.

 

1999 : création du centre d'accueil de Sangatte

Les associations s'alarment du manque de moyens pour venir en aide aux migrants.

En septembre 1999, sous le gouvernement Jospin, un centre d'accueil de réfugiés est ouvert dans une ancienne usine d'Eurotunnel, à Sangatte, à 12 km de Calais et à 3 km de l'entrée du tunnel.

Sa gestion est confiée à la Croix-Rouge. Mais la structure s'avère inadaptée.

Ce hangar sans confort, conçu pour 800 personnes, en accueille rapidement plus du double, dans des conditions très précaires.

 

2001:

Accusé de devenir une plaque tournante pour les passeurs et les trafics

en tous genres, le centre de Sangatte est dans le collimateur d'Eurotunnel et des autorités britanniques.

 

2002 : fermeture du centre de la Croix-Rouge

En septembre 2002, le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, annonce la fermeture du centre de la Croix-Rouge, sous la pression de son homologue britannique, David Blunkett, assorti d'une aide au retour.

Le hangar est vidé de ses derniers occupants en décembre.

« Sangatte était un scandale. Sa fermeture met fin à l'inefficience française et européenne face à l'immigration clandestine »,

se réjouit alors Nicolas Sarkozy.

 

2009 : fermeture de la « jungle »

Mais la destruction du centre de Sangatte n'a pas réglé le problème.

Après une baisse momentanée du nombre de clandestins, les migrants reviennent en nombre.

Traqués, sans lieu attribué, ils se réfugient dans les bois ou dans des terrains vagues près des points de passage des camions en route vers le Royaume-Uni.

Le plus grand de ces campements de fortune, surnommée la « jungle », est dans le collimateur du ministre de l'immigration, Eric Besson.

En septembre 2009, les migrants sont délogés au cours d'une vaste opération médiatique.

« La loi de la jungle ne régnera pas à Calais », avertit le ministre.

 

2010-2012 : destructions de camps et « harcèlement » policier

Le démantèlement de la « jungle » réduit la visibilité des migrants à Calais, mais d'autres camps plus petits se forment, puis sont détruits régulièrement par les forces de l'ordre, dans une traque sans fin.

Les associations dénoncent les conditions déplorables et l'insécurité dans laquelle se trouvent les clandestins.

 

2012:le Défenseur des droits, Dominique Baudis,

lance une alerte sur le « harcèlement » dont sont victimes les migrants par les forces de l'ordre.

Mais la situation évolue peu.

 

2014 : création d'un nouveau centre

A Calais et dans les environs, les associations essaient tant bien que mal de fournir repas et soins aux migrants.

Mais face à une hausse importante du nombre de réfugiés (+ 50 % ces derniers mois), en raison de l'instabilité au Moyen-Orient, la mairie de Calais a demandé davantage de moyens de l'Etat.

Revirement inattendu, le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, a annoncé en septembre la création d'un centre d'accueil de jour dans un ancien centre aéré de la ville, dimensionné pour 1 200 personnes.

 

Le préfet du Pas-de-Calais, cité par La Voix du Nord, a précisé que le centre Jules-Ferry ouvrirait « très prochainement » de façon expérimentale pour six mois.

En théorie, il n'a pas vocation à héberger les migrants.

Mais certaines associations craignent déjà « un nouveau Sangatte » et dénoncent un retour quinze ans en arrière.

 

 

Article dans son contexte original, avec de nombreux liens :

http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/10/23/a-calais-quinze-ans-d-impuissance-de-l-etat_4510949_3224.html

Passeurs d'Hospitalités - association Calais