A Calais, le 2 juillet 2014, 610 étrangères et étrangers ont été, une nouvelle fois, délogés par les forces de l’ordre du lieu où elles et ils s’abritaient faute de solution alternative.

Il en est systématiquement ainsi depuis que, le 5 novembre 2002, le gouvernement français a fermé et détruit le centre d’accueil des «réfugiés» situés sur la commune de Sangatte et géré par la Croix-Rouge.


 

Violence d’État


contre les exilés de Calais

 

Libération - Tribune - 27 JUILLET 2014

Par Un collectif de chercheurs, enseignants-chercheurs, universitaires

 

Le 22 septembre 2009, la jungle de Calais a été évacuée et détruite :

276 migrants, dont 135 mineurs, ont été arrêtés.

 

Depuis, la fermeture du centre de Sangatte, les camps et lieux de vie des migrants se sont multipliés autour des ports et le long des autoroutes.

Ils y survivent dans des abris de fortune, dans la promiscuité et l’insalubrité.

Ces lieux sont régulièrement détruits.

 

Ces derniers mois, les événements se sont accélérés.

Les évacuations des lieux de vie, les arrestations et les violences policières se sont multipliées.

 

Le 28 mai, à Calais, les lieux de vie et les biens personnels de plusieurs centaines de migrants sont détruits sur décision préfectorale pour cause d’une épidémie de gale ignorée depuis deux mois par l’administration malgré les appels répétés des associations.

Le même jour, en protestation, les exilés occupent l’esplanade grillagée utilisée par les associations lors des distributions de repas.

 

Le 2 juillet, ce lieu est évacué en même temps que trois squats.

Plus de 600 personnes (dont 121 mineurs) font l’objet de contrôles d’identité, sont emmenées dans des bus vers différentes villes

et les documents de certaines d’entre elles sont confisqués.

206 personnes sont enfermées dans différents Centres de Rétention Administrative.

Ainsi éloignées, elles se retrouvent privées de leurs soutiens militants.

Dans les jours suivants, la quasi-totalité des exilés interpellés sont de retour dans les rues de Calais.

 

Le 12 juillet, une manifestation de soutien réunit plus de 500 personnes.

Le même jour, l’ouverture d’un nouveau squat dans une usine désaffectée, soutenue par plus d’une trentaine d’associations locales et nationales, est rendue publique.

 

Le 22 juillet, cinq personnes - trois migrants et deux militants - sont convoquées au tribunal d’instance de Calais dans le cadre d’une audience d’urgence à la suite d’une plainte du propriétaire du site occupé.

Cette plainte invoque la dangerosité de cet ancien site industriel, alors même que les zones les plus dangereuses ont été interdites d’accès par les occupants eux-mêmes.

Jeudi 24 juillet, le tribunal a statué pour l’expulsion, comme si l’occupation de l’usine relevait d’une envie collective de pur confort.

Il n’a pas reconnu l’état de nécessité dans lequel se trouvent les exilés par la faute d’un État qui ne respecte aucune de ses obligations :

- droit à l’hébergement universel défini comme une «liberté fondamentale»,

- droit au respect de la dignité humaine,

- droit à des conditions matérielles d’accueil définies par la loi pour les demandeurs d’asile,

- droit à la protection et à des mesures éducatives pour les mineurs isolés,

- droit à la santé,

- etc.

 

Nous, chercheurs, enseignants-chercheurs et universitaires,

  • Nous dénonçons le harcèlement policier, la multiplication sans alternative des évacuations des lieux de vie des migrants, et les destructions de leurs abris et effets personnels.

Venus d’Afghanistan, d’Érythrée, du Soudan ou de Syrie, ils n’ont pourtant d’autres choix que de fuir la violence, l’injustice, la corruption et la misère.

Nous rappelons que les droits à l’hébergement, à l’accès aux soins, ainsi qu’à la protection des mineurs isolés sont des droits fondamentaux.

Nous nous préoccupons du respect de ces droits ainsi que du respect de la dignité humaine sur l’ensemble du territoire français.

  • Nous constatons que l’assistance à personne en situation de grande précarité est aujourd’hui assurée par les associations et les militants alors qu’il s’agit de compétences de l’État.

  • Nous soutenons l’ensemble des associations et des militants engagés à Calais et dans les environs.

  • Nous interpellons le gouvernement et l’ensemble des élus pour qu’une solution de logement adapté et durable soit trouvée pour l’ensemble des migrants.

 

Les premiers signataires sont :

Michel Agier Anthropologue, directeur d’études à l’École des Hautes Études en sciences sociales (EHESS)

Étienne Balibar Professeur émérite de philosophie politique et morale, Paris-Ouest-Nanterre

Luc Boltanski Sociologue, directeur d’études à l’EHESS

Claude Calame Helléniste et anthropologue, directeur d’études à l’EHESS

Olivier Clochard Géographe, chargé de recherches CNRS, président de Migreurop

Jean-Philippe Dedieu Sociologue, New York University

Véronique De Rudder Sociologue, chargée de recherches CNRS

Eric Fassin Sociologue, professeur des universités, Paris 8

Virginie Guiraudon Sociologue du politique, directrice de recherches CNRS, Sciences-Po

Smaïn Laacher Sociologue, professeur des universités, Strasbourg

Frédéric Lebaron Sociologue, professeur des universités, université de Versailles- Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ)

Danièle Lochak Professeure émérite de droit public, Paris-Ouest-Nanterre, présidente honoraire du groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti)

Lilian Mathieu Sociologue, directeur de recherches CNRS

Alain Morice Anthropologue, directeur de recherches CNRS, membre de Migreurop

Johanna Siméant Professeure de sciences politiques, Paris-I

Patrick Simon Socio-démographe, Directeur de recherches à l’Institut national des études démographiques (Ined)

Serge Slama Maître de conférences en droit public, Paris-Ouest-Nanterre Alexis Spire Sociologue, directeur de recherches CNRS

Emmanuel Terray Anthropologue, EHESS

Maryse Tripier Sociologue, professeure émérite, Paris-Diderot

 

Plus d’informations sur : http://www.psmigrants.org/site/tribune-exiles-calais/

TEMOIGNAGE

On entends les passer et repasser les rabatteurs en Hélicoptères et avion qui chassent à vue ceux qui ont échappé aux troupes au sol.

 

Ce matin à 6H , le quartier de la rue de Moscou était déjà bouclé.

Les soutiens qui n'étaient pas déjà sur le camp n'ont pas pu approcher.

Dans le même temps, les portes des squats étaient défoncées pour les vider de leurs occupants.

Opération de grande envergure, on frappe fort , on frappe vite , on ne laisse aucune chance. Hommes, Femmes, Enfants, pas de détails.

 

Ah oui , et on fait aussi en sorte de virer les journalistes pour pas que ça se voit trop quand même.... et on gaze gentillement les citoyens qui essayent d’empêcher les bus ( ils auraient du affréter un train plutôt ).

 

J'ai l'impression de cauchemarder... On est bien en France? En Europe?

Pas au soudan? ou en Syrie? Je ne comprends pas.

Ce matin 2 juillet 2014 à Calais, France: C'EST LA RAFLE !!!!

 

 

F. - Association Calais, Ouverture et Humanité – page Facebook

GUERRE CONTRE LES PAUVRES

La police et les gendarmes mobiles ont évacué le mercredi 2 juillet 2014 à 6h du matin l'aire de distribution des repas de la rue de Moscou à Calais.

Ainsi que trois squats du centre-villeoù les exilés s’abritaient (rues Massena, du Vic et Aubert).

Plus de 600 migrants ont été interpellés.

 

Le site de la rue de Moscou servait tous les jours aux associations pour distribuer les repas aux nombreux migrants qui vivent à Calais.

Il était occupé par plusieurs centaines de migrants depuis fin mai 2014, c’est à dire depuis le démantèlement des deux plus importants camps de migrants de Calais.

 

Une bonne partie s'était alors réfugiée là, ce qui leur permettait de vivre sur le lieu de distribution des repas.